LE PAYS DE LIÈGE ET LA FRANCE - LES FAITS ESSENTIELS DE LA RÉVOLUTION LIÉGEOISE DE 1789 : L'insurrection du 18 août 1789

Publié le par sorinabarjov

ATTENTION : les versions polonaises ou russes de ce texte sont des traductions fautives faites à mon insu par des inconnus qui les répandent sur le WEB. Ces traductions sont les fruit des logiciels Google de traduction automatique. Elles n'ont aucune valeur scientifique. Seul ce texte en français (ci-dessous) est digne d'être cité en référence.

 

SUR TOUT CECI, SUIVONS L'HISTORIEN PAUL HARSIN 1


Déjà en mars 1787 les chefs patriotes s'étaient demandés s'ils allaient tenter un coup de main violent pour venir à bout de l'obstination du Prince.

Le colonel Ransonnet, le fabricant d'armes Gosuin, le colonel Donceel étaient sur le point de brusquer les choses, voire même d'enlever le Prince, mais Fabry et ses amis avaient préféré attendre encore.

Peu de mois après eut lieu un enrôlement d'hommes armés à Spa (Colette, Ransonnet, etc..., cfr supra).

En juin 1789, excité par les nouvelles de France, Fabry paraissait envisager le concours de la garnison prussienne de Maestricht pour "en finir".

 

Fabry

J.-J. Fabry

 


Juillet 1789 : effervescence à Liège et dans le Franchimont, manifestations populaires.

Les ouvriers de Gosuin, conduits par quelques bourgeois, parcoururent les rues de Liège, en musique, comme pour exciter la foule. Les cocardes apparaissaient à Theux et Spa ; à Liège dans les premiers jours d'août 1789. Il était question de plus en plus d'Assemblée nationale, les Nobles ayant demandé en mai 1789 la convocation des États.

Il faut noter l'influence décisive de la Nuit du 4 août française. Dès le 9 août certaines communautés franchimontoises réclamèrent la réunion d'une assemblée particulière du Marquisat et le 15 août prirent l'initiative de convoquer pour le 26 à Polleur un "Congrès de la Nation franchi­montoise".

L'Évêque prit peur :  il annonça le 13 août son intention de réunir les États et proposa au Chapitre de Saint-Lambert et à tout le Clergé de renoncer à leurs exemptions pécuniaires et de con­sentir à l'égalité de tous dans la répartition des charges publiques.

Pendant qu'un modéré comme l'ex-bourgmestre Chestret, rentré de Wetzlar, entrait en contact avec le chanoine de Paix et le comte de Geloes, neveu du Prince, et que les frères Bassenge prépa­raient une adresse "au public", en réponse au Prince, d'autres jugèrent le moment venu de hâter les événements : Gosuin, Ransonnet, l'avocat Lyon et quelques centaines d'ouvriers excitèrent le peuple de la Cité pendant l'après-midi du 17 août (la Note aux citoyens de Bassenge venait de paraître).

Note aux citoyens de Bassenge aîné :

« Il n'est plus temps de pourvoir par des mesures partielles à la situation. L'abandon de l'exonération fiscale du Clergé ne soulagera pas la classe pauvre soumise aux taxes de consom­mation et la réunion des États ne rendra pas au Tiers sa physionomie indépendante. C'est la constitution même du Pays qui est à réformer et, avant tout, le Règlement de 1684 à révoquer. Tant que la Nation ne sera pas représentée par des mandataires librement choisis, toutes ses institutions demeureront corrompues. Il faut donc tendre à une solution nationale que "l'exemple de la France appelle" et, sans priver personne de ses prérogatives ni de ses pro­priétés, recouvrer la liberté dans un dévouement commun au patriotisme. »

  L'alarme était vive ; l'un des Bourgmestres voulait composer avec l'opposition et demanda un rendez-vous à Chestret. L'autre Bourgmestre, au contraire, parlait de faire arrêter les porteurs de cocardes.

 

Chestret

Chestret

 

 

Le Prince fut réveillé dans la nuit du 17 au 18 août, peu après minuit, par le Chancelier et ses neveux (Geloes et Méan) : il mit par écrit "une formule où il se déclarait disposé à consentir à ce qui pourrait contribuer à la satisfaction des vœux de la Nation". Dès six heures du matin, cette "formule" fut portée à la connaissance de Chestret, en vain. En effet, les ouvriers de Gosuin, toute la population des faubourgs et une foule sans cesse grossissante encombraient les rues centrales de Liège ; quelques meneurs armés, conduits eux-mêmes par Lyon et Gosuin, envahirent l'Hôtel de ville et signifièrent aux Bourgmestres et Conseillers de la Cité que le Peuple révoquait leur mandat et qu'ils avaient à vider les lieux. En même temps, les ouvriers de Gosuin, toute la population des faubourgs et une troupe de patriotes dirigés par Ransonnet prirent possession de la Citadelle, d'où ils firent sortir le Régiment national liégeois, qui fut bientôt licencié. La foule entraîna Fabry et Chestret et, dans les acclamations, les nomma malgré eux Bourgmestres, et désigna une vingtaine de leurs amis comme Conseillers, et deux autres (cfr Borgnet), "sans doute plus radicaux" comme "bourgmestres corégents", Gosuin devenant Mambour de la Cité.

Il fallait faire sanctionner par le Prince le changement politique intervenu le 18 août 1789 : le même jour, l'après-midi, la foule liégeoise voulut se rendre au Château de Seraing, où se trouvait le Prince, dans sa résidence d'été. Chestret prit la tête du mouvement, pendant que Fabry tentait de rétablir l'ordre dans la ville.

La foule resta sur la rive gauche de la Meuse, laissant Chestret, le comte de Geloes et quelques autres pénétrer dans le Château, situé sur la rive droite.

  220px-Château Cockerill-Seraing

Le château de Seraing, lieu de séjour des princes-évêques de Liège


Hoensbroeck voulut se dérober, mais sur l'insistance de Chestret, il retourna à Liège, à la nuit tombante, arborant la cocarde liégeoise.

Arrivé à l'Hôtel de ville, au milieu de l'enthousiasme général, le Prince signa l'abrogation de l'Édit de 1684, l'élection du nouveau Conseil communal, etc...

Reconduit à pied au Palais en pleine nuit, le Prince retourna à Seraing dans la matinée du 19 août pour y ratifier la nomination "souhaitée" du comte de Lannoy en qualité de Grand mayeur, et celle du baron de Saroléa de Cheratte comme Sous-mayeur.

Hoensbroeck revint encore à Liège pour recevoir les gouverneurs généraux des Pays-Bas qui, de Spa, venaient lui faire officiellement visite et, en compagnie des nouveaux magistrats, les traita somptueusement au Palais le 21 août.

Tous les diplomates étrangers accrédités à Liège croyaient la Révolution achevée. Les États devaient être convoqués pour la semaine suivante pour mettre de l'ordre à la Constitution et régu­lariser les changements indispensables. L'accord semblait réalisé. Les Bonnes villes du Pays opérèrent une modification analogue de leur statut municipal et procédèrent librement à la désignation de nou­veaux magistrats, − excepté Châtelet, semble-t-il. Changement de magistrature à Verviers le 18 août, à Spa le 19 août.

 

Ransonnet

Général Ransonnet

 


Le 26 août vit l'ouverture du Congrès de Polleur, qui s'attribua le droit de disposer du produit des impôts perçus dans le quartier de Franchimont et voulut sommer les États de s'ouvrir à ses représentants.

Avant la fin du mois d'août les manants du ban d’Amay demandèrent que chaque baillage eût ses députés aux États.

À Liège un recès municipal du 23 août rappela que toutes les taxes de consommation subsis­taient (sauf l'impôt "de 40 patars", virtuellement abrogé). S'ensuivirent des rassemblements tumul­tueux au faubourg Sainte-Marguerite et en Outremeuse.

Le 25 août la foule assiégea l'Hôtel de ville et obtint l'abolition de tous les impôts communaux ; mais la "fièvre révolutionnaire" ne baissait pas malgré les patrouilles de la garde bourgeoise. Certains "exaltés" réclamaient le remplacement des États par une Assemblée nationale.

Le 26 août, pris de peur, le Prince, accompagné de son neveu Méan (l'évêque suffragant), quitta sa résidence de Seraing pour gagner l'étranger et se réfugier à l'abbaye Saint-Maximin de Trèves, prétendant être disposé à sanctionner les mesures qui paraîtraient s'imposer dans le cadre de la consti­tution traditionnelle, et affirmant ne pas vouloir porter plainte à l'Empire.

Hélas, au contraire, le Prince subit plus fortement que jamais l'influence de ses conseillers les plus réactionnaires.

Les Patriotes durent donc adopter des mesures "extrêmes" pour tenter d'organiser un nouveau Pouvoir exécutif.

 

 

 

 

1 HARSIN, La Révolution liégeoise..., pp. 47-54.


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